Fin de l’abondance pour les start-ups ?

Avec l’inflation et la remontée des taux d’intérêt directeurs par les banques centrales, l’accès aux capitaux se complique pour les start-ups. Les investisseurs et les start-ups doivent aujourd’hui s’adapter à un environnement caractérisé par de nouvelles restrictions et le renforcement de tendances de marché préexistantes (solutions low-tech, souveraines et éthiques). La prudence des investisseurs et la modération de l’utilisation des ressources budgétaires et énergétiques signifie-t-elle pour autant une modération des profits et de la croissance <de jeunes pousses qui construisent l’économie de demain, notamment en France ?

C’est un constat frappant qui se présente à nous. D’après les données récoltées par Crunchbase, 81 milliards de dollars avaient été levés au troisième trimestre 2022, contre 172 milliards un an plus tôt sur la même période à travers le monde. Seules 37 start-ups ont dépassé le milliard de dollars de valorisation sur cette période, tandis qu’elles étaient 163 au troisième trimestre 2021.

L’assèchement des capitaux est préoccupant pour les start-ups françaises, déjà confrontées à d’autres crises. Plusieurs facteurs viennent en effet appesantir le bilan de ces entreprises : la hausse des prix, amplifiée par la guerre en Ukraine, le remboursement des prêts garantis par l’État (PGE) pour les start-ups qui y ont souscrits, restrictions énergétiques, spectre de nouvelles restrictions sanitaires…Les start-ups pourraient donc manquer de dry powder et revoir leurs ambitions de développement à la baisse. Par ailleurs, les investisseurs demandent aux entrepreneurs de proposer des modèles économiques qui montrent une rentabilité dans des délais plus brefs.

Or, les signaux étaient au vert ces dernières années. La French Tech fête ses 10 ans et enchaîne des levées de fonds record. A l’été 2021, l’écosystème a ainsi franchi les 10 milliards d’euros levés, soit 10 fois plus qu’en 2015. Autre gage de satisfaction, l’attractivité a repris des couleurs. La France reste le pays le plus attractif en Europe en matière d’investissements étrangers depuis 2018. Cette montée en puissance des investisseurs internationaux se traduit aujourd’hui par les plus de 30% de start-ups avec des fonds internationaux dans leur table de capitalisation en 2022 contre 25% dix ans plus tôt. La crise engendrée par les mesures gouvernementales en réponse à l’épidémie de Covid-19 n’a d’ailleurs pas terni la dynamique des start-ups françaises.

Faut-il pour autant céder au pessimisme ? A priori non. Le volontarisme politique en direction des start-ups n’est plus à démontrer comme l’illustrent les réformes récentes (loi PACTE…) et les dispositifs crées ces dix dernières années (Bpifrance, Campus Cyber…). Le chiffre d’affaires cumulé des start-ups de la French Tech dépasse aujourd’hui les 8 milliards d’euros. Fait plus important qui dépasse les seuls couloirs des administrations françaises : les start-ups semblent armées pour encaisser les transitions du monde à venir. Leur agilité leur permet en effet d’adopter des formes de travail hybride et des initiatives adaptées aux aspirations des collaborateurs, lesquelles participent à la qualité de vie au travail, attirant et fidélisant d’autres talents. Au-delà des considérations ESG, elles peuvent être plus efficaces car leurs solutions innovantes sont déployables rapidement dans des marchés en constante évolution, comme l’illustre le succès de l’industrie 4.0.